Si vous pensiez qu’il était compliqué de faire tourner une entreprise sur une île d’Océanie loin de tout, c’est que vous n’aviez pas essayé de le faire en zone rurale sur cette même île. Comment une banque locale apporte son aide aux petites entreprises.
Presque toutes les entreprises de Nouvelle-Calédonie sont situées à Nouméa, le chef-lieu, qui se trouve sur l’île principale, Grande Terre. Nouméa s’est développée autour des mines de nickel. C’était le site le plus propice à la construction d’un port reliant la Nouvelle-Calédonie à ses plus proches voisins : le Vanuatu et l’Australie. Le chef-lieu regroupe désormais près des deux tiers de la population de ce territoire insulaire du sud-ouest de l’océan Pacifique, qui compte environ 280 000 habitants.
Cependant, à l’extérieur de Nouméa, les possibilités de développement se révèlent rares pour les entreprises.
« Le potentiel de croissance qui s’offre aux entreprises n’est pas le même dans la province Nord ou dans les Îles Loyauté », explique Jean Bourrelly, directeur général adjoint de la Banque calédonienne d’investissement (BCI). « Des entreprises de 30 ou 50 employés qui ciblent l’île tout entière dans leur activité, ce n’est pas réaliste en dehors des environs immédiats du chef-lieu. »
Pourtant, cette zone rurale abrite de nombreuses petites entreprises qui peuvent proposer des services de proximité et élargir leur clientèle, mais qui n’ont pas les moyens d’investir dans leur activité. La BCI entend changer cela. « Les entreprises de Nouméa peuvent chercher à développer leur activité sur l’ensemble du territoire. Mais pas celles du Nord ni, en particulier, celles des Îles Loyauté. Par exemple, un vitrier expérimenté basé à Nouméa peut trouver des chantiers sur tout le territoire. Mais quelqu’un du Nord n’aura pas cette chance à Nouméa, et c’est ce que nous constatons pour de nombreux artisans et professionnels qualifiés », explique Jean Bourrelly.
C’est à ce niveau que la BCI se distingue clairement des autres banques présentes en Nouvelle-Calédonie : elle tient compte des artisans et professionnels qualifiés. La BCI s’emploie à être un partenaire financier pour chacun sur l’ensemble du territoire et elle est disposée à prendre des risques pour appuyer les entreprises les plus récentes et les secteurs insuffisamment desservis. Elle propose en premier lieu des petits prêts de manière à ce que les petites entreprises puissent accroître leur offre à l’intention d’une clientèle locale, mais son action va au-delà.
« Notre intention est de soutenir autant que possible le développement de ce territoire et d’aider le plus grand nombre. Telle est notre vocation », affirme Jean Bourrelly.
La Banque européenne d’investissement (BEI) a déjà octroyé deux prêts à la BCI au cours des dernières années. Alors que le premier a aidé à financer plusieurs initiatives, parmi lesquelles une petite centrale solaire et un jardin maraîcher dont la production est cultivée et vendue sur place, le second se concentre sur les petites entreprises.
Des secteurs à suivre
Non seulement la BCI soutient des entreprises qui fournissent des services de proximité essentiels et représentent véritablement une nouvelle offre par rapport aux grandes entreprises de Nouméa, mais elle entend également se tourner vers des secteurs nouveaux et insuffisamment desservis de l’économie.
Le tourisme en fait partie. L’archipel est une destination touristique depuis plusieurs décennies, mais il n’exploite pas tout son potentiel. On y trouve des complexes hôteliers de moyenne et plus grande taille, mais les possibilités sont limitées. « Il y a un réel potentiel ici », affirme Jean Bourrelly. « Je parle de personnes qui créent des possibilités, pour elles-mêmes, mais aussi pour la Nouvelle-Calédonie dans son ensemble. »
Beaucoup ont eu l’idée d’ouvrir des maisons d’hôtes et des gîtes, mais ne sont pas parvenus à financer les travaux nécessaires. Avec cette ligne de crédit, ils seront plus nombreux à s’engager dans un tel projet, soit pour en faire leur source principale de revenu, soit comme complément. Jean Bourrelly précise que la BCI pourrait accompagner ainsi un nombre important d’entrepreneuses. « Pour notre portefeuille de prêts portant sur des montants peu élevés, le ratio hommes/femmes est de 50/50 », explique-t-il. « Ce sont souvent les femmes qui ont l’idée d’ouvrir une maison d’hôtes. Elles ont la responsabilité du foyer et voient là un moyen d’améliorer les conditions de vie pour elles-mêmes et pour leur famille. »
Lorsque Jean Bourrelly dit que les îles n’exploitent pas pleinement leur potentiel pour le tourisme, il ne pense pas uniquement à l’hébergement. « Je ne suis peut-être pas objectif, mais cet archipel est magnifique. Les Îles Loyauté en particulier. Le lagon est l’un des plus étonnants au monde. Nous pouvons faire plus pour attirer les gens ici. »
Désormais, les habitants de la région qui ont un projet peuvent s’adresser à la BCI. Par exemple, les entreprises unipersonnelles de pêche qu’elle a soutenues par le passé pourraient investir dans plus de bateaux et les utiliser à d’autres fins, explique Jean Bourrelly.
« Nous avons beaucoup de ressources naturelles. Le lagon pourrait être exploité pour le tourisme. Les eaux qui nous entourent sont riches et variées. L’économie bleue est un concept auquel nous devons nous intéresser, pour ce qui est de la pêche et de l’aquaculture durables. »