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  • Des politiques de soutien vigoureuses lors de la pandémie ont contribué à prévenir les faillites à grande échelle dans les Balkans occidentaux : seulement 3 % des entreprises ont déposé le bilan ou mis définitivement la clé sous la porte.
  • Le commerce avec les économies développées, l’information et le savoir-faire acquis grâce aux chaînes de valeur mondiales et l’accès aux technologies étrangères ont contribué à stimuler l’innovation et la compétitivité dans la région.
  • La transition vers une économie neutre en carbone présente des risques importants pour les Balkans occidentaux, et les mesures incitant les entreprises à verdir leurs modèles économiques sont insuffisantes.
  • Le manque d’accès au financement continue de freiner la croissance des PME de la région. En particulier, le financement des jeunes pousses et entreprises innovantes est entravé par le manque d’antécédents en matière de crédit et la dépendance à l’égard d’actifs incorporels difficiles à garantir.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie et ses répercussions économiques se produisent au moment même où les entreprises des Balkans occidentaux se remettent du choc de la pandémie de COVID-19. L’exposé intitulé « La résilience des entreprises dans les Balkans occidentaux en période de chocs répétés », présenté aujourd’hui par Debora Revoltella, économiste en chef de la BEI, au conseil stratégique du Cadre d’investissement en faveur des Balkans occidentaux à Rome, examine comment les entreprises de la région ont résisté à la forte récession provoquée par la pandémie ainsi que leur degré de préparation aux défis futurs. Les résultats sont tirés du rapport Résilience des entreprises pendant la pandémie et au-delà, que viennent de publier conjointement la BEI, la BERD et le FMI et qui porte sur l’ensemble de l’Europe de l’Est et de l’Asie centrale.

Le texte intégral du rapport est disponible ici.

Un résumé est disponible en ligne à cette adresse.

« La guerre en Ukraine met une nouvelle fois à l’épreuve la résilience des économies des Balkans occidentaux, qui se remettent à peine de la pandémie », a expliqué Debora Revoltella. « De nouveaux risques et une incertitude accrue placent les flux transfrontaliers et les échanges commerciaux sous tension. Il s’agit d’un point non négligeable, car notre analyse montre que la résilience et la capacité d’innovation des entreprises sont liées à leur participation aux chaînes de valeur et aux échanges commerciaux à l’échelle mondiale. En cette période de tendances potentielles à la démondialisation, les Balkans occidentaux devraient s’appuyer sur l’avantage concurrentiel qu’ils tirent de leurs liens étroits avec l’Union européenne et les renforcer davantage, en tant que tremplin pour un développement plus rapide. »

Balkans occidentaux – l’impact de la pandémie de COVID-19

À ce jour, les entreprises ont traversé la pandémie mieux qu’on ne le craignait initialement. Elles y ont laissé 29 % de leur chiffre d’affaires et 9 % de leur main-d’œuvre, la pandémie ayant particulièrement frappé les services à forte intensité de contact et les petites et moyennes entreprises. Néanmoins, un soutien politique massif a contribué à prévenir les faillites à grande échelle, puisque seulement 3 % des entreprises de la région ont demandé l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité ou fermé définitivement leurs portes.

Le rapport montre que les entreprises intégrées dans les chaînes de valeur mondiales, celles qui se sont montrées plus innovantes par le passé, celles dont la transformation numérique était plus avancée ou celles bénéficiant d’un encadrement de meilleure qualité se sont mieux adaptées pendant la pandémie. Elles ont affirmé leur présence en ligne, adopté le télétravail, ajusté la production ou su tirer plus efficacement profit de l’appui disponible.

Les programmes gouvernementaux ont joué un rôle stabilisateur en atténuant la pression sur les entreprises vulnérables, comme les petites entreprises, les entreprises autonomes et celles n’ayant pas accès au découvert.

L’ouverture aux échanges dans les Balkans occidentaux stimule la résilience, l’innovation et la compétitivité

Part des innovateurs, % des entreprises par profil en matière d’échanges

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Source : calculs de la BEI sur la base de l’enquête sur les entreprises menée par la BEI, la BERD et la Banque mondiale en 2019.

Le rapport fait le constat que les économies des Balkans occidentaux investissent généralement plus dans l’innovation que les économies de référence, même si ce processus passe principalement par l’adaptation de nouvelles technologies développées ailleurs. L’ouverture de l’économie mondiale a été essentielle pour permettre à ces pays d’améliorer leurs avantages comparatifs et d’accroître leur compétitivité. La composition industrielle des régions davantage intégrées dans les chaînes de valeur mondiales est clairement axée sur les produits à plus forte valeur ajoutée, tandis que celles qui sont moins intégrées font des échanges qui concernent principalement des produits à faible valeur ajoutée ou des matières premières.

Les données du rapport indiquent que l’intégration commerciale avec les économies développées, en particulier l’Union européenne, l’accès à l’information et au savoir-faire grâce à la participation aux chaînes de valeur mondiales, à la technologie sous licence étrangère ou aux pratiques de gestion modernes figurent parmi les ingrédients les plus importants pour stimuler l’innovation dans les Balkans occidentaux.

Déficits de financement

Jusqu’à présent, les systèmes financiers des Balkans occidentaux ont bien résisté. Les entreprises continuent de dépendre en grande partie du crédit bancaire pour leur financement externe. Les marchés des capitaux sont sous-développés et la disponibilité de capital-risque, de capital-investissement ou de crédit-bail est très réduite. La part des entreprises exposées à des contraintes de crédit dans les Balkans occidentaux est nettement plus élevée parmi les petites entreprises que parmi celles de grande dimension (16 % contre 7 %). Ces contraintes de crédit résultent d’un manque de transparence des PME, ainsi que de la capacité limitée des intermédiaires à évaluer les risques. À l’avenir, les incidences de la pandémie de COVID-19 et de l’invasion russe de l’Ukraine risquent d’entraver davantage l’accès des entreprises aux financements. Au fil du temps, la hausse des taux directeurs se traduira par un resserrement des conditions de financement et par un creusement de l’écart entre l’offre et la demande de crédit pour les PME. Ce point est source d’inquiétude, dans la mesure où l’accès aux financements, y compris aux découverts, a permis aux entreprises de résister pendant la pandémie.

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Source : calculs de la BEI sur la base de l’enquête sur les entreprises menée par la BEI, la BERD et la Banque mondiale en 2019. « Petites » désigne les entreprises de moins de 20 employés, « moyennes » les entreprises comptant de 20 à 99 employés et « grandes » celles comptant 100 employés ou plus.

Économie verte

La région s’affranchit lentement de sa dépendance au charbon et au pétrole au profit de l’énergie nucléaire et des énergies renouvelables, renforçant ainsi sa sécurité énergétique. Cependant, jusqu’en 2018, la région s’est fortement appuyée sur les combustibles fossiles pour produire les trois quarts de son électricité. Plusieurs pays continuent d’accorder des subventions généreuses qui limitent le prix du gaz et d’autres combustibles fossiles facturé aux consommateurs, ce qui ébranle la motivation à réduire les émissions.

Les mesures incitant les PME des Balkans occidentaux à verdir leurs modèles économiques sont généralement insuffisantes. Les petites et moyennes entreprises des Balkans occidentaux subissent déjà des risques climatiques physiques : 10 % des personnes interrogées lors de l’enquête sur les entreprises signalent des pertes dues à des phénomènes météorologiques extrêmes au cours des trois années précédant l’entretien. Pourtant, l’étude révèle une prise de conscience limitée des PME aux questions environnementales, puisque seulement 21 % d’entre elles investissent dans l’efficacité énergétique, et parmi celles qui n’adoptent aucune mesure climatique, 59 % considèrent que cet investissement n’est pas une priorité. Plus précisément, le rapport montre que les investissements à l’appui de l’action pour le climat dépendent à la fois des capacités de gestion et de l’accès aux financements. Une intervention efficace permettra de remédier à la fois aux contraintes de financement et aux goulets d’étranglement dans la sensibilisation et la capacité des équipes dirigeantes.

À propos du rapport

Résilience des entreprises pendant la pandémie et au-delà – Adaptation, innovation, financement et action climatique de l’Europe de l’Est à l’Asie centrale est une publication conjointe de la Banque européenne d’investissement (BEI) et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), avec des contributions du Fonds monétaire international (FMI). Les données contenues dans ce rapport ont été recueillies et analysées avant l’invasion armée de l’Ukraine par la Russie.

Le rapport utilise un ensemble de données spécifique, au niveau des entreprises, selon la dernière édition de l’enquête sur les entreprises menée par la BEI, la BERD et le Groupe de la Banque mondiale (Enquête sur les entreprises, 2019), qui a recueilli des données sur plus de 28 000 entreprises enregistrées, de 2018 à 2020. Fournissant un aperçu structurel des entreprises de la région, l’enquête a été réalisée juste avant le début de la pandémie. Le rapport utilise également le premier cycle du complément d’enquête sur les entreprises relatif aux incidences de la pandémie, qui a permis d’interroger plus de 16 000 entreprises. La Banque mondiale s’est basée sur ce complément d’enquête pour examiner le degré d’adaptation des entreprises à la crise.