Les grandes banques multilatérales de développement (BMD) ont franchi une étape importante dans la lutte mondiale contre la fraude et la corruption en signant aujourd'hui un accord mutuel sur l'exclusion des entreprises et individus convaincus d'actes répréhensibles dans le cadre de projets de développement financés par des BMD.

Cet accord, qui porte sur des exclusions d'une durée supérieure à un an, réunit le Groupe de la Banque africaine de développement, la Banque asiatique de développement, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, le Groupe de la Banque interaméricaine de développement et le Groupe de la Banque mondiale.

Les sanctions prévues par les BMD incluent généralement le blâme, la mise sous condition de marchés futurs ou l'exclusion ferme - qui revient à déclarer l'entreprise ou la personne concernée inéligible à toute participation dans une activité future financée par la banque, pour une période déterminée ou indéterminée. Cette exclusion publique, qui s'accompagne de risques à la fois financiers et de réputation, est considérée comme un élément majeur de dissuasion contre les malversations. Aux termes du nouvel accord, toute entreprise ou personne exclue par une BMD peut être sanctionnée pour le même motif par les autres banques de développement participantes.  

« L'accord d'exclusion mutuel conclu ce jour entre les banques de développement est un message clair sur la volonté de lutter contre la corruption ; il dit en substance que si vous volez et trompez l'une d'elles, vous pouvez être sanctionné par toutes, a déclaré Robert B. Zoellick, président du groupe de la Banque mondiale. Cette mesure confère à la communauté des BMD un nouveau levier puissant pour demander des comptes à ceux qui se rendent coupables de corruption ou de fraude dans le cadre de projets de développement, ainsi qu'un dispositif efficace pour inciter les entreprises à assainir leurs opérations. Les règles sont désormais plus strictes. Cet accord signale aussi à nos États membres que le peu de ressources consacré au financement du développement va bien là où il doit aller. »

« Une action unifiée est essentielle à la réussite de nos efforts conjugués pour lutter contre la corruption et empêcher celle-ci de compromettre l'efficacité du développement, a commenté Luis Alberto Moreno, président de la Banque interaméricaine de développement. Grâce à des sanctions croisées, à un meilleur partage de l'information et à des enquêtes coordonnées, nos institutions devraient mieux réussir à prévenir, détecter et décourager la corruption. ».

Les BMD qui participent à l'accord continueront d'appliquer séparément leurs propres règles de prévention et de détection de la fraude et de la corruption dans les projets. Mais le nouvel accord leur offre l'occasion d'approfondir leur coopération dans la gestion des risques de fraude et de corruption.

« Avec cette coopération renforcée, la lutte contre la fraude et la corruption menée par les banques multilatérales de développement passe à la vitesse supérieure. S'attaquer résolument à la corruption est crucial pour favoriser un développement économique durable, capable d'attirer les investissements et d'inspirer la confiance. C'est une étape très importante », a ajouté Thomas Mirow, président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement.

Les efforts entrepris à l'échelle mondiale pour combattre la corruption et l'empêcher de saper l'efficacité du développement ne réussiront que si l'on intensifie les mesures de dissuasion. « Avec une approche unifiée et coordonnée de la lutte contre la fraude et la corruption, il sera plus facile à l'aide fournie par les banques multilatérales de développement dans le monde d'atteindre les bénéficiaires visés. Nos actions collectives pour réduire la pauvreté et favoriser une croissance économique durable verront ainsi augmenter leur efficacité dans le développement », a pour sa part affirmé Haruhiko Kuroda, président de la Banque asiatique de développement.

Cette mesure exécutoire collective valide l'engagement pris par ces institutions le 17 septembre 2006 dans le cadre du groupe de travail des institutions financières internationales pour la lutte contre la corruption. Avec l'accord de 2006, les banques multilatérales de développement s'engageaient à explorer plus avant les moyens de reconnaître mutuellement leurs mesures respectives de conformité et d'application. Aux termes de cet accord, les institutions convenaient d'harmoniser leurs définitions des pratiques répréhensibles et de partager davantage d'informations sur les enquêtes. L'exclusion croisée, le meilleur partage des informations et la coordination des investigations devraient permettre aux institutions de mieux prévenir, détecter et décourager la corruption. Une attitude ferme, symétrique et coordonnée permet en outre de montrer aux États et entreprises privées partenaires que chaque institution maintient les mêmes normes élevées.

« Les efforts partagés et la coopération amenés par ce nouvel accord amélioreront l'efficacité des actions de développement, car les entreprises et individus convaincus d'actes répréhensibles de fraude et de corruption ne pourront plus profiter de ressources destinées au développement et à la lutte contre la pauvreté. Le nouvel accord est un outil de plus pour conférer une meilleure efficacité aux efforts de dissuasion visant la corruption tant du côté de son auteur que du côté de son bénéficiaire », s'est réjoui Donald Kaberuka, président de la Banque africaine de développement.

La Banque européenne d'investissement, qui accueillait la cérémonie de signature, a salué cette démarche. « La BEI s'est elle-même engagée à lutter contre la corruption et accueille avec satisfaction l'accord d'exclusion conjoint conclu ce jour entre les autres banques multilatérales de développement. En tant que banque de l'Union européenne, la BEI va étudier la possibilité de s'associer à l'accord tout en respectant le cadre juridique européen dans lequel elle évolue. D'ici là, la BEI s'efforcera, dans sa propre politique d'exclusion, de tenir pleinement compte des décisions prises par les autres BMD », a expliqué Philippe Maystadt, président de la Banque européenne d'investissement.