Recherche Fr menu fr ClientConnect
Recherche
Résultats
5 premiers résultats de la recherche Voir tous les résultats Recherche avancée
Recherches les plus fréquentes
Pages les plus visitées

    Les transports publics revêtent une importance capitale pour la relance verte, la décarbonation, la qualité de vie dans les et la création d’une mobilité durable dans les centres urbains densément peuplés. Face aux besoins pressants des pays d’atteindre les objectifs fixés en matière de climat, les décideurs cherchent à développer et à moderniser les transports publics.

    La construction de réseaux de transports publics étendus et hautement sophistiqués nécessite des investissements à long terme et la refonte de l’ensemble du système de transport urbain concerné. Mais la réussite d’un projet de transport ne dépend pas uniquement de son financement. L’offre de transports publics doit également être attrayante, mais aussi adaptée à ceux qui les utilisent, à savoir le grand public.

    Pour qu’un projet de transport soit efficace, il doit également s’inscrire dans une culture prônant l’utilisation des transports publics. Sinon, la demande et les incidences positives seront limitées et l’investissement n’en vaudra pas la peine. Cela a des implications pour le type de transport public qu’une ville choisit de mettre en place, comme l’a appris Nicosie, la capitale chypriote, lorsqu’elle nous a demandé d’évaluer son projet de tramway.

    Nous avons constaté que la dépendance excessive de Nicosie à l’égard des transports motorisés posait problème pour la mise en place d’un réseau de tramway efficace et avait des conséquences négatives évidentes pour l’environnement et la santé de ses habitants. Nous avons dès lors recommandé que la ville commence par créer une culture des transports publics, en améliorant son réseau d’autobus, avant d'envisager de réaliser des investissements coûteux dans des infrastructures de transport pour l’avenir. Voilà les conclusions auxquelles nous sommes arrivés.

    Un plan pour verdir la ville de Nicosie

    Les habitants de Nicosie sont dépendants du transport motorisé individuel pour se déplacer dans la ville.Chypre a l’un des taux de possession de voitures les plus élevés au monde (plus de 629 voitures pour 1 000 habitants) et l’utilisation de transports respectueux de l’environnement y est minime. Dans l’agglomération de Nicosie, la part des déplacements en transports publics s’établit seulement à 3 %.Le vélo affiche une part encore plus faible, à 2 %.

    Le recours élevé au transport motorisé individuel diminue en réalité la mobilité, en pesant sur la circulation et la qualité de vie en ville. Le trafic permanent augmente la pollution atmosphérique et sonore, et réduit la sécurité routière, ce qui a des conséquences néfastes sur la santé des citoyens et rend la ville moins attrayante pour y travailler, y faire ses achats et y vivre.

    C’est la raison pour laquelle le gouvernement chypriote et les autorités locales de Nicosie ont décidé de s’attaquer au problème de la circulation en adoptant un plan directeur intégré pour la mobilité. Ce plan vise à rééquilibrer la situation actuelle, où l’utilisation de la voiture est prépondérante, en diversifiant les solutions de déplacement et en mettant l’accent sur des centres locaux, disposant chacun d’un pôle commercial fort afin que les navetteurs n’aient pas systématiquement à se diriger vers le centre-ville aux heures de pointe. Il vise également à transformer Nicosie en une ville plus agréable à vivre, avec une meilleure utilisation des espaces publics pour les interactions sociales et une meilleure accessibilité pour tous les habitants.

    Pourquoi il est difficile de construire un réseau de tramway efficace

    La construction d’un important réseau de tramway n’est pas sans risque. Les difficultés commencent très tôt. Avant même la construction, les ingénieurs et spécialistes de l’aménagement doivent choisir les itinéraires, décider de l’emplacement des stations, mener des études environnementales, élaborer les plans de conception et s’occuper de tous les permis d’aménagement et autorisations environnementales nécessaires. Ces procédures peuvent prendre des années. La phase de construction représente donc, par comparaison, une période relativement courte dans l’ensemble du cycle de vie d’un grand projet d’infrastructure de transport.

    Ensuite, il y a des difficultés associées à la construction elle-même. Souvent il est nécessaire de déplacer les installations de services collectifs, de reconstruire des rues, de creuser des tunnels, d'ériger des ponts, de poser des voies et d'aménager des arrêts. Dans une zone densément peuplée, comme Nicosie, ces travaux de construction pourraient avoir des répercussions sociales délicates sur le plan de la mobilité, de l’activité économique et de la qualité de vie.

    Selon la situation sur place, les coûts de construction peuvent varier considérablement : par exemple, lorsque la mauvaise qualité du sol complique le creusement des tunnels, ou lorsqu’il s’agit de construire des tronçons souterrains ou surélevés. Alors que certains réseaux de tramways peuvent être peu onéreux, les coûts peuvent rapidement être multipliés par dix, voire plus, lorsque les conditions sont difficiles.

    ©Construction of the railway./ Shutterstock

    C’est pourquoi, en 2018, les autorités de Nicosie ont demandé aux services de Jaspers, une initiative d’assistance technique lancée par la Banque européenne d’investissement et la Commission européenne, d’émettre un avis indépendant sur la mise en œuvre du projet de tramway de la ville. Jaspers a mis en évidence un certain nombre de risques opérationnels, techniques et financiers qui nécessiteraient des efforts ciblés pendant la préparation du projet. Cependant, nos spécialistes ont constaté que le plus grand défi résidait dans le facteur qui, au départ, avait incité Nicosie à se lancer dans ce projet, à savoir la faible utilisation des transports publics.

    C’est la raison pour laquelle Jaspers a recommandé de procéder par étapes pour rendre la réalisation du tramway de Nicosie faisable. Tout d’abord, il y a lieu de revoir la proposition de tramway existante et d’élaborer un concept définitif qui repose sur une approche plus dynamique pour s’approprier l’espace routier, améliorant ainsi les performances du tramway lui-même, et tenir compte de l’environnement et des besoins des citoyens. Une fois la conception définitive du projet de tramway arrêtée, il faudra commencer à investir dans l’exploitation d’autobus sur le tracé établi. L’objectif est de susciter à nouveau l’intérêt des habitants pour les transports publics et de rendre ces derniers plus attrayants pour les déplacements en ville. Cela générerait également une demande de la part des usagers, ce qui est crucial pour la poursuite des investissements et le succès, à terme, du projet de tramway. Chaque investissement supplémentaire dans des voies d’autobus, des arrêts, la billetterie et l’information des usagers dans le couloir du tramway rapprochera le projet de sa forme définitive à mesure que le nombre d’usagers augmentera.

    La qualité des services de transport public – et donc leur attrait – dépend dans une large mesure de leur fréquence, des tarifs et de leur fiabilité. Ce n’est que si les transports publics sont sûrs, fiables et efficaces qu’ils seront effectivement utilisés. Parvenir à offrir de tels services est essentiel pour assurer la réalisation d’un réseau de tramway. En l’absence d’une culture des transports publics, le projet de tramway ne peut avoir qu’un impact minimal. En investissant dans ses infrastructures de transport public existantes, la ville de Nicosie convaincra ses habitants de délaisser leurs voitures et leurs motos. Le moment sera alors venu de mettre le tramway en marche.