Discours liminaire : Eila Kreivi, conseillère principale en finance durable de la BEI


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Mesdames et Messieurs,

Je vous remercie vivement de me recevoir ici à l’occasion de l’édition 2022 du Forum Prix Charlemagne-Europe afin d’aborder la question de la sécurité énergétique, qui est clairement l’un des défis les plus pressants auxquels l’Europe est aujourd’hui confrontée.

Cette conférence intervient sur fond de profondes incertitudes, souffrances humaines et inquiétudes.

L’invasion brutale de l’Ukraine par la Russie a plongé l’Europe dans sa plus grande crise en matière d’urgence sécuritaire et de réfugiés depuis la Seconde Guerre mondiale.

À la BEI, nous sommes toutes et tous choqués par les atrocités indicibles, les morts et les destructions infligées par Vladimir Poutine et ses soldats au peuple ukrainien.

De même, dans la Biélorussie voisine, celles et ceux qui risquent leur vie et leur liberté au nom de la défense de la démocratie méritent notre gratitude et notre profonde estime. C’est pourquoi je suis très heureuse que le Prix Charlemagne récompense cette année trois femmes exceptionnelles, cheffes de file de l’opposition biélorusse :  

Svetlana Tikhanovskaya, qui était la candidate de l’opposition aux élections de 2020 en Biélorussie, ainsi que Veronica Tsepkalo et Maria Kolesnikova, qui ont appuyé sa candidature face au dictateur Alexandre Loukachenko. Tatsiana Khomich viendra recevoir le prix au nom de sa sœur Maria Kolesnikova, qui est emprisonnée en Biélorussie.

Ici en Europe, la guerre a rendu plus pressante que jamais la nécessité de protéger notre souveraineté et notre autonomie.

Néanmoins, cette guerre tragique offre la formidable occasion d’effectuer des investissements audacieux afin de nous libérer de notre dépendance à l’énergie fossile russe tout en contribuant parallèlement à résoudre le principal problème à long terme pour l’humanité : les changements climatiques.

Cela doit d’abord et avant tout se traduire par la construction d’infrastructures vertes dans le domaine de l’énergie solaire et éolienne, dans les réseaux électriques, dans les installations de stockage et dans les terminaux de gaz naturel liquéfié, qui pourront ensuite être utilisés pour l’hydrogène vert.

L’UE, dans son ensemble, est confrontée à ce défi. Par conséquent, nous devons agir de concert. En nous unissant, nous disposons d’un plus grand pouvoir d’achat vis-à-vis des fournisseurs. En outre, une meilleure connectivité entre les réseaux électriques des États membres profiterait à tous les pays de l’UE, par exemple pour pouvoir importer de l’énergie éolienne en cas d’accalmie à l’échelle régionale. Nous avons pu expérimenter un autre avantage de la connectivité il y a tout juste 10 jours, lorsque la Russie a coupé l’approvisionnement en électricité de la Finlande, qui est parvenue à le remplacer par des importations en provenance d’Estonie et de Suède.

Les Européens devraient également investir massivement dans l’efficacité énergétique et, à cette fin, combiner programmes de subventions et prêts des banques de développement.

Mais l’ampleur des investissements nécessaires dépasse de loin ce que les États et les pouvoirs publics peuvent et devraient fournir.

Le secteur privé et les marchés des capitaux doivent donc jouer un rôle clé, et la BEI peut apporter son concours pour les mobiliser. 

En tant que banque des États membres de l’UE, la BEI fournit des financements à des conditions favorables sur de longues périodes. C’est possible parce que nous pouvons nous financer sur les marchés financiers à un coût inférieur à celui des banques commerciales.

Autre force de la BEI : nous comptons dans nos effectifs non seulement des banquiers, mais aussi des ingénieurs et des biologistes, qui peuvent déterminer quels projets et technologies sont prometteurs également sur le plan environnemental. Lorsque nous finançons un projet, cela convainc généralement les autres de nous suivre.

La mise en place de parcs éoliens flottants constitue un bon exemple.

L’idée consiste à installer des éoliennes sur des plateformes flottantes de forage pétrolier qui peuvent être ancrées. L’avantage de ce type de parcs éoliens flottants : ils peuvent fournir de l’énergie éolienne dans n’importe quel pays, même lorsque le littoral est en pente raide, et servir de centrales de base. La technologie antérieure des éoliennes en mer conventionnelles ne peut pas être utilisée en eaux très profondes.

Un parc éolien au large des côtes portugaises a représenté un du premier de ces projets. Depuis, trois autres parcs éoliens ont vu le jour. Le potentiel est énorme : on estime qu’une fois que la technologie sera opérationnelle à l’échelle industrielle, elle pourra produire plus d’électricité que ce qui est consommé aujourd’hui dans le monde.

En outre, lorsque nous examinons les marchés des capitaux, nous voyons beaucoup d’évolutions dans la bonne direction.

Lorsqu’en 2007, la BEI a émis les premières obligations vertes, nous avons été des pionniers. Certains nous croyaient fous à l’époque !

Rien qu’en 2021, les nouvelles émissions d’obligations vertes ont dépassé 600 milliards d’euros. Les émissions d’obligations sociales ont bondi à près de 210 milliards d’euros. Et les nouvelles émissions d’obligations pour le développement durable, qui s’attaquent à la fois à des problématiques environnementales et sociales, ont atteint environ 190 milliards d’euros.  Cela signifie que les investissements nécessaires peuvent faire l’objet de financements importants sur les marchés des capitaux.

Mesdames et Messieurs,

En tant qu’Européennes et Européens, ensemble, nous pouvons faire beaucoup pour obtenir notre indépendance du pétrole et du gaz russes et pour ralentir les changements climatiques. Je me réjouis d’en discuter avec vous.

Je vous remercie de m’avoir écoutée.