En Afrique, les banques résistent bien à la pandémie de COVID-19 et déploient une grande créativité pour surmonter les problèmes générés par la crise. Mais la guerre en Ukraine suscite de nouvelles inquiétudes. Alors que les taux d’intérêt augmentent dans de nombreux pays et que l’émission d’obligations est devenue plus onéreuse, un grand nombre de banques sont préoccupées par l’augmentation des coûts de financement. Ce n’était pas le cas dans le cadre de l’enquête précédente, les banques craignant alors principalement que la pandémie ne nuise à la qualité de leurs portefeuilles de prêts.
Les autres difficultés auxquelles les banques sont aujourd’hui confrontées sont les suivants :
- l’incitation à recourir à davantage de technologies numériques et à étendre les services bancaires mobiles ;
- le besoin d’investir dans l’action climatique ;
- la volonté d’accroître le financement de projets dirigés par des femmes.
Les banques affichent un optimisme prudent
La qualité des actifs des clients reste cette année une source d’inquiétude pour de nombreuses banques, en particulier pour les prêts aux petites et moyennes entreprises. Les chiffres clés relatifs aux prêts non productifs ne reflètent pas la réalité dans son ensemble, car un grand nombre de ces prêts font l’objet de restructurations ou de moratoires, ce qui signifie que :
- les remboursements sont retardés ;
- le problème des prêts non productifs peut être plus important que ne le suggèrent les données officielles ;
- les prêts non productifs sont susceptibles d’augmenter dans certains pays, car les mesures de soutien des États sont abandonnées progressivement et les conditions économiques difficiles persistent à l’échelle mondiale.
Les banques s’attendent à une hausse de la demande de prêts et prévoient d’intensifier leurs opérations, ce qui nécessitera également une amplification de leurs capacités de financement. Le nombre de banques qui prévoient d’accroître leur activité de prêt est un peu plus élevé en 2022 qu’en 2021. Malgré d’évidentes inquiétudes quant à la qualité des actifs des clients, le secteur affiche un optimisme prudent.
Compte tenu des inquiétudes entourant la qualité du crédit, les banques prévoient en 2022 de durcir les conditions d’emprunt pour la troisième année consécutive. En conséquence, il sera plus difficile pour certaines personnes d’obtenir des prêts. Il existe également des obstacles de longue date qui empêchent certaines entreprises d’obtenir des prêts bancaires, comme l’absence de sûretés ou encore de mauvais antécédents de crédit, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Ces difficultés reviennent année après année dans notre enquête.
Efforts accrus pour accorder des prêts aux femmes
Des progrès sont faits pour faciliter l’octroi de prêts aux femmes :
- 70 % des banques interrogées ont mis en place une stratégie en matière d’égalité entre les sexes et parrainent des initiatives axées sur les femmes et la dimension de genre au sein des collectivités, soit une progression de 10 points de pourcentage par rapport à l’enquête de 2021.
- Quatre banques sur dix ont constaté que le ratio de prêts non productifs des entreprises dirigées par des femmes était inférieur à celui des entreprises dirigées par des hommes. Dans certains pays, la différence est encore plus marquée. Au Nigeria, 71 % des banques ont des ratios de prêts non productifs plus faibles pour les femmes, tout comme 50 % des banques au Kenya.
Accélération de la transformation numérique
La pandémie a entraîné une accélération de la transformation numérique du secteur bancaire, les banques étant contraintes d’utiliser les canaux numériques comme les courriels et l’internet pour contacter la clientèle :
- 90 % des banques conviennent que la pandémie a accéléré leur transformation numérique interne ;
- 70 % disent qu’elles ont augmenté les services numériques proposés à la clientèle ;
- toutefois, il existe des contraintes liées à l’intensification du numérique. Trois quarts des banques considèrent les risques liés à la cybersécurité comme la principale difficulté.
La croissance rapide du secteur des technologies financières a également accéléré la transformation numérique des banques. Le secteur des technologies financières en Afrique est passé de 450 entreprises en 2020 à plus de 1 000 en avril 2022. Parmi celles-ci, 80 % sont d’origine locale et 20 % proviennent de l’extérieur de l’Afrique. Les services de paiement et de prêt restent les produits dominants, mais le secteur s’est diversifié. La concurrence croissante dans ce secteur est une préoccupation majeure pour les banques, plus de la moitié d’entre elles la citant parmi leurs trois principales difficultés.
De nouveaux plans climatiques pour les activités de prêt
Malgré toutes les difficultés auxquelles les banques sont confrontées, le climat reste une préoccupation majeure. Quatre banques sur cinq pourraient bientôt formaliser une stratégie climatique. Les banques souhaitent définir de nouveaux plans climatiques, car elles veulent réduire les risques liés aux changements climatiques et accroître les financements verts. Elles cherchent davantage à comprendre leurs risques climatiques. En 2021, près de 42 % des banques évaluaient dans quelle mesure leur portefeuille de prêts pourrait être affecté par les changements climatiques. Ce chiffre est passé à 46 % en 2022.
Près de 70 % des banques considèrent les prêts climatiques comme une occasion de lutter contre les changements climatiques. À ce jour, seule une banque sur cinq a lancé des produits de prêt verts, ce qui signifie qu’il existe une marge de progression importante. Les banques auront besoin d’un soutien dans ce domaine. Environ 60 % citent un manque de savoir-faire, de données et d’outils pour évaluer les risques climatiques parmi les raisons pour lesquelles elles ne s’intéressent pas davantage aux produits verts. En outre, deux tiers des banques pensent que les institutions financières internationales comme la Banque européenne d’investissement peuvent les aider à accélérer le déploiement des prêts verts en fournissant des formations et une assistance technique. Cela indique clairement que les institutions internationales peuvent contribuer à accroître les prêts verts en Afrique.